L'archéologie expérimentale
LES
MODES DE CONSTRUCTION
La fouille des sites archéologiques nous permet de connaître les architectures, mais le plus souvent uniquement sous forme de plans. Si on retrouve des trous de poteaux, des tuiles ou des anciennes traces de fondation, beaucoup de vestiges ne sont pas conservés en élévation. Cela pose un gros problème d'interprétation des modes de construction, notamment pendant les périodes où le bois et la terre constituaient les principaux matériaux. Vous vous en douterez, c'est surtout l'habitat rural qui souffre de ce manque d'indices archéologiques.
La pratique de l'archéologie expérimentale permet donc de travailler sur les élévations, même si il faut toujours garder en tête le côté hypothétique des restitutions, et l'absence d'informations sur l'esthétique, et sur l'emplacement et la forme des ouvertures.
Batir sa maison
Les charpentes
Au
Château d'Orville dans le Val d'Oise, on a travaillé
sur l'habitat du Haut Moyen Age. Suite à des fouilles préventives
liées à la construction d'une autoroute entre 1997 et 1999,
des reconstitutions expérimentales d'une cabane et d'un grenier
ont été réalisées pour mieux apréhender
les techniques de charpenterie.
Le choix de matériaux de qualité est indispensable pour un bon ajustage de l'ossature, et pour la stabilité générale. Chaque élément de bois doit donc être judicieusement placé au sein de la charpente, selon sa forme, sa taille et sa résistance. C'est un travail qui nécessite beaucoup d'expérience.
L'étape la plus difficile a été le levage des pans de bois (comme sur la photo) car leur charge était plus importante que prévue.
Pour en savoir plus sur ces expériences, visitez le site internet du Château d'Orville
S'adapter à son environnement
Si la maison est le refuge de l'homme contre les agressions de l'extérieur, elle doit être particulièrement bien adaptée à son environnement. Il vous paraît évident aujourd'hui qu'on ne fasse pas un toit de la même manière qu'on soit dans une région pluvieuse ou sèche... et vous n'avez rien inventé ! Depuis que l'homme se construit des abris, il adapte les technologies et les matériaux au contexte.
Vivre au bord des Lacs
Maison palaffites , berges surélevées, drainages, niveaux d'eaux différents... Les adaptations aux milieux lacustres sont nombreuses, et les interprétations des vestiges sont parfois contradictoires.
L'archéologie
expérimentale a apporté des réponses et des débuts
de piste dans ce domaine, grâce notamment à l'une des plus
importantes opérations expérimentales portant sur l'habitat
lacustre néolithique : l'expérience de Chalain et
Clairvaux, menée en 1988-1989 par Pierre et Anne-Marie
Pétrequin sur les berges de ces deux lacs jurassiens. Suite
à la fouille de deux villages néolithiques , un projet de
reconstitution de deux maisons sur pilotis a été mené
sur les rives du lac de Chalain pour tester certaines hypothèses
sur les modes de construction. C'est une expérience tellement importante
qu'il y a même des pages qui lui sont consacrées sur le site
du ministère de la culture. Je vous encourage à les visiter,
elles sont formidablement bien faites et vous en apprendrez bien plus que
sur ces pages.
Il aura fallu 2 mois de travail à une équipe de 6 à 8 hommes pour reconstruire une maison sur pilotis. Et celle-ci a tenu courageusement pendant 11 ans face aux agressions extérieures : pluie, froid, gel.... C'est un véritable exploit, d'autant plus qu'il faut prendre en compte le fait que la maison a du se dégrader plus rapidement car elle n'était pas habitée. La douzième année, les poteaux porteurs ont cédé et la maison s'est couchée sur le côté. 12 ans, c'était exactement la période de "survie" estimée d'après les études dendrochronologiques menées sur les véritables vestiges.
Aujourd'hui, une quarantaine de chercheurs professionnels ou bénévoles travaillent encore sur le site sous la direction de 2 laboratoires :
* Le laboratoire de Chrono-écologie (université de Besançon)
* Le Centre de Recherches Archéologiques de la Vallée de l'Ain (Bouzailles)
Ils contribuent à faire avancer la recherche scientifique, et n'oublient pas au passage les interventions en direction du public. Donc si vous passez dans le Jura, un petit détour ne sera pas décevant.
...
Le
Projet du Lac Luokesas (Lithuanie) - des découvertes exceptionnelles
Les équipes du projet du Lac Luokesas se sont posé une question particulièrement pertinente : comment les hommes préhistoriques faisaient pour planter dans les lacs les pieux de soutien de leurs habitations ? Sur la base d'un assemblage retrouvé en fouilles, ils ont reconstitué un système très ingénieux pour mener à bien cette opération avec un nombre réduit de personnes et dans un temps minimum.
Deux triangles en bois sont assemblés pour former une sorte de prisme. On amène l'assemblage par flottage jusqu'à l'emplacement du pieux, des personnes montent sur le triangle supérieur pour faire couleur la structure et qu'elle repose sur le fond, le pieux est glissé dans la structure et peut être très facilement redressé par effet de levier. Il s'enfonce ensuite sous son propre poids dans le fond du lac.
La reconstitution a prouvé l'efficacité de cet outil de construction : il aura fallu moins de 10 minutes à 4 hommes pour planter un pieux.
Le site du Lac de Luokesas est toujours en cours de fouilles et d'étude, vous pouvez visiter le site internet de Francesco Menotti pour en savoir plus.
Destructions et dégradations
Comment faire d'une catastrophe un atout scientifique
Les reconstitutions, comme toutes contructions, peuvent être sujettes à des accidents et des catastrophes. Et maheureusement, il y en a plusieurs exemples : un début d'incendie a déjà détruit une reconstitution du centre de Buster Farm à cause d'un stupide court-circuit du panneau lumineux sortie de secours, une ferme du Musée des Temps Barbares a également été détruite par le feu suite à un orage, et en 2006 au centre d'Altamira en République Tchèque, on soupçonne une main malveillante d'avoir allumé l'incendie qui a ravagé une maison de l'Age du Fer.
Mais les chercheurs ont de la ressource et ont réussi à transformer ces catastrophes en véritables lieux d'expérimentations.
Organiser des fouilles sur ces sites pourtant reconstitués permet de faire un lien entre les traces archéologiques et les événements : les analyses des traces laissées par ces incendies ont permis d'améliorer l'identification sur les véritables sites archéologiques. On a ainsi gagné de ces événements malheureux un point de comparaison essentiel pour étudier les modes de destruction et de dégradation des constructions.
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Vous pouvez présenter dans ces pages vos propres projets d'archéologie expérimentale,
Faites connaître votre travail et contribuez à enrichir ce site !
Pour cela, n'hésitez pas à prendre contact avec moi par mail !